Extrait de la correspondance de Jean-Jacques Rousseau, écrivain, philosophe et musicien(1712/1778)
« Je voudrais dans le service de ma table, dans la parure de mon logement, imiter par des ornements très simples la variété des saisons, et tirer de chacune toutes ses délices, sans anticiper sur celles qui la suivront. Il y a de la peine et non du goût à troubler ainsi l’ordre de la nature, à lui arracher des productions involontaires qu’elle donne à regret dans sa malédiction, et qui, n’ayant ni qualité ni saveur, ne peuvent ni nourrir l’estomac, ni flatter le palais. Ce n’est qu’à grand frais que tel riche de Paris, avec ses serres chaudes, vient à bout de n’avoir sur sa table toute l’année que de mauvais légumes et mauvais fruits … Si je voulais goûter un mets du bout du monde, j’irais, comme Apicius, plutôt l’y chercher, que de l’en faire venir, car les mets les plus exquis manquent toujours d’un assaisonnement qu’on apporte pas avec eux et qu’aucun cuisinier ne leur donne, l’aire du climat qui les produits. »
